nom commun ; exemples : un peuple de race blanche.
Une race est un groupe d’individus dont les caractéristiques biologiques se conservent au-delà des générations. Comme l’on est en droit de se demander ce que peuvent bien signifier ces soi-disant caractéristiques biologiques, on peut s’interroger sur le bien-fondé ou surtout l’utilité lexicale de l’utilisation profuse du mot « race ».
Si l’on parle de race noire ou de race jaune, ou de race en général, on obtient (pour ceux qui osent en faire l’expérience) des froncements de sourcil, du front, des visages figés typiques de la réaction consécutive à l’écart de langage.
Si l’on parle de race blanche, on a à peu près la même chose. On est soupçonné soit de commencer un discours inspiré par Rosenberg, soit d’être un infâme raciste.
Voyons un peu.
En Septembre 2015, Nadine Morano déclare : « Nous sommes un pays judéo-chrétien. Le général de Gaulle le disait, de race blanche, qui accueille des personnes étrangères. ». Aussitôt, la phrase est reprise, critiquée, vilipendée etc. En Chine, on n’imaginerait pas qu’un politique ne parle pas de « race chinoise » ; dans un pays arabe, de pays « musulman » ; dans un pays africain, d’Africains entendus comme « noirs ». Mais naturellement, nous sommes la France, et nous devons montrer l’exemple lexical au monde. Là-dessus, tous se précipitent afin de protéger l’héritage de De Gaulle, lequel selon Alain Peyrefitte aurait pourtant bien dit (argument souvent utilisé par l’extrême droite) : « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. » Jusque là, le commentateur moderne est satisfait. Pas mal, De Gaulle après tout. Ensuite, ça se gâte un peu : « Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. » Aïe aïe aïe… Le Général… « Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. » Remarquez ici l’absence de « judéo-chrétien ». Chrétien devient « judéo-chrétien » lorsqu’il s’agit de montrer que l’on n’est pas antisémite, mais « judéo-chrétien » devient choquant de nos jours lorsqu’il faut montrer que l’on n’est pas islamophobe. Charles ensuite pète les boulons : «Qu’on ne se raconte pas d’histoires ! Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! ». Selon Alain Peyrefitte, c’est qu’a dit le Général en 1959. Alors, vingt-deux ans après la publication du livre, on se précipite au secours du Général. Un historien dit même : « Cette phrase a été prononcée à l’emporte-pièce dans une conversation privée… ». C’est bon, nous sommes rassurés.
Revenons au mot « race » ou « race blanche » ; dans le dictionnaire, mais un mot à ne pas prononcer. Sauf…
Sauf si le contexte est clair.
Et quand on pense néo-linguistique ou novlangue, on pense à Claude Bartolone.
Quand il accuse Valérie Pécresse de clientélisme vis-à-vis de « Versailles, Neuilly et la race blanche », ce n’est pas Robert Mugabe incitant son électorat noir à envahir les fermes blanches et d’en exproprier les fermiers avec violences physiques et viols de leurs femmes, c’est Claude Bartolone. Mais il ajoute : « Notre région, ils veulent la mettre en rang, en uniforme, un serre-tête sur les cheveux. ». D’accord, il est attaqué par la droite, mais pas vraiment condamné par ses amis de gauche. À titre d’exemple, imaginez la réaction si Pécresse lui avait dit : « Notre région, ils veulent la confiner à la maison, en burka, le voile autour des cheveux. ». Sans commentaire.
Le langage, soi-disant créé pour faciliter la communication entre les humains, a perdu sa neutralité. Les mots se définissent maintenant en fonction de ceux qui les utilisent. Ce que peut dire cet abruti de Bartolone, cette abrutie de Morano ne peut pas le dire.