« L’île aux trente cercueils » est un roman d’aventures de Maurice Leblanc publié en 1919. C’est un des romans les plus durs de Leblanc ; on reste dans le registre noir, commencé avec Le bouchon de cristal puis surtout 813. Comme dans Le triangle d’or, Arsène Lupin y campe un héros quasiment invincible.
L’île aux trente cercueils, un roman dans une continuité ?
« L’île aux trente cercueils » est un roman de guerre, à l’instar de L’Eclat d’obus, ou de Le triangle d’or. L’action se passe en 1917, le méchant est un malade d’origine polonaise, mais ce qui domine, c’est une intense germanophobie. Arsène Lupin, comme dans les deux romans de guerre précédemment cités, n’intervient qu’en deuxième partie. Et comme dans Le triangle d’or, son pseudonyme, Don Luis Perenna, est quasi invincible. On est assez loin du Lupin humain, gouaillard, à la fois bravache et chevaleresque, on approche du surhomme à la française, temps de guerre oblige ? Jusque là, on a une continuité, mais « L’île aux trente cercueils » introduit aussi une discontinuité : l’action se déroule en huis-clos. Tout se passe ou presque dans l’île fictive de Sarek, au large de l’archipel des Glénans. Et c’est dans ce cadre breton que Leblanc choisira de nous peindre des scènes qui oscillent parfois entre le fantastique et l’horreur.
Résumé de l’histoire
Véronique d’Hergemont est enlevée par Alexis Vorski, un aristocrate d’origine polonaise, tandis que son père, Antoine d’Hergemont, est assailli par quatre individus. Alexis avait manifesté à Hergemont ses désirs d’épouser sa fille Véronique, mais celui-ci l’avait alors humilié et insulté. Finalement, Véronique se marie avec Alexis. Ils ont un fils. Antoine d’Hergemont finit par accepter l’union de sa fille avec son ravisseur. Pourtant, pour se venger, Antoine d’Hergemont enlève François, le fils de Véronique, et s’enfuie sur un yacht qui fait naufrage. Véronique rentre au couvent. Vorski disparaît. Ceci se passait en 1902.
Quinze ans plus tard, Véronique arrive dans le petit village du Faouët. Elle a fait appel à un détective privé. Ce dernier a appris que Vorski était mort. Le détective a également appris qu’il y a dans un petit village, pas loin de Quimperlé, une maison avec sur la porte d’entrée une inscription, V d’H. Est-ce une coïncidence ? Dans le doute, Véronique se rend dans le village. C’est alors que des évènements curieux se succèdent à une vitesse étonnante. Elle arrive devant cette maison, entre, y découvre un cadavre. Elle trouve aussi un rouleau de papier qui représente quatre femmes crucifiées sur quatre arbres. L’une de ces femmes, c’est elle. Sur le côté du rouleau de papier, il y aussi une série d’inscriptions : « Quatre femmes en croix », « Trente cercueils », « La Pierre-Dieu qui donne mort ou vie… ». Puis le cadavre disparaît…
Elle quitte la maison, retrouve la même inscription V d’H. Elle couche dans le village de Rosporden. Elle rencontre Honorine, une Bretonne, qui lui parle de l’île aux trente cercueils, Sarek. Elle découvre qu’Honorine connaît Antoine d’Hergemont, qu’il n’est donc pas mort et que de plus c’est elle qui a élevé son fils François, maintenant âgé de quatorze ans. Elle apprend aussi qu’il y avait quatre matelots qui accompagnaient son père dans son faux naufrage. La description du matelot Maguennoc, l’un d’entre eux, correspond au cadavre qu’elle a vu la veille dans la cabane. Selon Honorine, le matelot Maguennoc lui avait expliqué qu’il serait le premier à partir, et qu’après, ce serait le tour d’Antoine d’Hergemont. Inquiètes, le lendemain, Honorine et Véronique partent pour Sarek, l’île entourée de trente écueils. Elles accostent, puis marchent vers le nord de l’île. Quand elles arrivent enfin, elles assistent à une scène incroyable : François menace Antoine d’Hergemont puis le tue. Après quoi il tue Marie Le Goff et blesse Honorine. Antoine d’Hergemont meurt dans les bras de Véronique en évoquant la Pierre-Dieu, puis il l’implore de partir de Sarek, qui est maudite. Il mentionne aussi les quatre croix de Sarek, que Véronique avait vues représentées sur le rouleau dans la cabane du matelot Maguennoc.
Le lendemain, quand Honorine et Véronique se réveillent, elles assistent au loin à un spectacle inouï : agglutinés sur leurs barques, les habitants de Sarek fuient l’île. C’est alors qu’apparaissent François et son tuteur, Stéphane Maroux, qui commencent à tirer sur les insulaires, et tuent tous les occupants des barques. Honorine devient folle et se jette dans l’abîme. Véronique est maintenant seule, sans moyen de s’échapper de l’île. En parcourant Sarek, elle découvre les trois sœurs Archignat, puis les délivre. Elle met le feu au pont qui sépare Sarek de la petite île du Nord, où se trouve le Prieuré. C’est alors qu’elle aperçoit les trois sœurs Archignat au loin : elles sont crucifiées. Véronique se met à suivre le chien « Tout va bien » et découvre un tunnel qui permet de passer de l’île du nord à l’île principale de Sarek. C’est là qu’elle tombe sur une grotte où son fils François est prisonnier, enfermé depuis dix jours. Elle délivre aussi Stéphane Maroux, le professeur de François, qu’elle connaissait déjà étant enfant. Il lui révèle la légende des Trente cercueils, la Pierre-Dieu. Elle apprend qu’Antoine d’Hergemont connaissait Patrice Belval, le héros de Le triangle d’or. Belval aurait parlé de cette légende à Don Luis Perenna, lequel aurait déjà résolu le mystère de la Pierre-Dieu à distance…
C’est alors qu’un mécanisme diabolique élève le sol de la grotte jusqu’à la verticale. Enfermés dans la grotte, Véronique et Stéphane s’imaginent déjà plongeant dans le vide. Au dernier moment, une échelle parvient à leur portée (comme dans Le Triangle d’or). Elle croit que c’est François, mais c’est un adolescent qui lui ressemble, l’autre fils de Vorski. Tout s’explique : ce n’est donc pas François, son fils, qui a tiré sur son père, mais son demi-frère. Encore quelques évènements, et Véronique et François se retrouvent enfin. Ils décident de s’échapper en barque. François repart, et Véronique, partie à sa recherche, tombe sur Vorski. Vorski l’aime toujours. Il lui propose de redevenir sa femme. Elle refuse. Pour se venger, il organise un combat à mains nues entre François et son autre fils. Puis il la fait crucifier. Mais au dernier moment son projet échoue. C’est alors qu’il découvre un passage souterrain, une crypte abandonnée, et un …vieux druide gouailleur, dont les cabotinages l’agacent aussitôt. Il tire sur le vieux druide. Problème : les balles n’ont pas l’air de l’atteindre. Il s’agit en fait de Don Luis Perenna. Arrivent Patrice Belval et quelques hommes de main à la rescousse. Vorski maintenant éliminé, Don Luis Perenna raconte toute l’histoire, celle des Rois de Bohême et de leur dalle merveilleuse, qui un jour trouvèrent refuge à Sarek, histoire qui remonte à la nuit des temps…Ecoutons-le.
© 2013- Les Editions de Londres