« La comédie de la Marmite » ou Aulularia est une comédie de Plaute écrite vers 194 avant Jésus-Christ. C’est selon nous la plus célèbre des comédies de Plaute, et aussi celle qui fameusement inspira « L’avare » de Molière. La fin de « La comédie de la Marmite » manque.
La plus ancienne des farces ?
C’est une opinion personnelle et partagée par Les Editions de Londres, mais « La comédie de la Marmite » est, de toutes les comédies de Plaute, celle qui nous semble encore la plus moderne, et la plus agréable à lire. Pourquoi ? Ce n’est pas tant la comparaison ou l’évocation de « L’avare », car selon nous encore, il existe des pièces de Molière encore plus vives que « L’avare », comme « Le médecin malgré lui », ou « Les fourberies de Scapin ». Non, ce serait plutôt la force des dialogues, le ridicule des situations, et la vivacité des échanges, l’atemporalité de l’intrigue, l’exagération des sentiments, qui rendent cette pièce si proche et si authentiquement Farce.
Résumé de l’intrigue
Euclion est un vieil avare, bien heureux qu’on le croit pauvre, parce qu’ainsi on ne lui demande pas d’argent. Pourtant, il est paniqué à l’idée que l’on découvre son secret : il a trouvé par hasard une marmite pleine d’or que son grand-père avait soigneusement enterré dans son jardin. Depuis ce moment, il se méfie de tous et de toutes, et principalement de sa vieille servante Staphyla, qu’il soupçonne d’en avoir après son or.
La fille d’Euclion, Phédrie, a été violée par Lyconide au cours d’une fête un peu arrosée, et elle est enceinte. Grâce à la complicité de Staphyla, la jeune fille a pu elle aussi garder son secret. Lyconide veut faire amende honorable et épouser Phédrie. Or, le voisin d’Euclion, et accessoirement l’oncle de Lyconide, est tombé amoureux de Phédrie, mais il ignore qu’elle est enceinte. Il se met en tête de l’épouser, et vient demander sa main à Euclion. Ce dernier, méfiant, se demande bien si Mégadore, le riche voisin, n’en voudrait pas à son or, suite à une possible indiscrétion de Staphyla, mais devant l’insistance de Mégadore, il finit par accepter mais à condition qu’il l’épouse sans dot et qu’il paie tous les frais de la noce. Mégadore accepte. Euclion se méfie toujours autant, et déplace son or par mesure de précaution. Jugeant que ce sera une meilleure cachette, il va pour le dissimuler dans un temple. Mais il ignore que Strobile, l’esclave de Lyconide, le suit. Euclion aperçoit Strobile, le soupçonne aussitôt, et le fouille mais ne trouve rien. Inquiet, Euclion va vérifier que son or se trouve bien là où il l’a dissimulé, et c’est là que Strobile s’en empare dés qu’il a le dos tourné. S’en suit le célèbre monologue dont s’inspira tant Molière. Euclion rencontre ensuite Lyconide et le soupçonne d’être l’auteur du méfait, ce qui nous donne cet autre passage célèbre, le quiproquo où Euclion croit que Lyconide s’accuse du vol, alors qu’il ne fait qu’avouer sa responsabilité dans la grossesse de Phédrie. Lyconide comprend que c’est Strobile le coupable, il le convainc de rendre l’or, contre son affranchissement, suite à quoi on suppose que Lyconide pourra épouser Phédrie.
La comédie de la Marmite, étape d’un long palimpseste ?
De nombreux experts de Plaute ont relevé une série d’invraisemblances, voire de contradictions dans la pièce. Les invraisemblances ne nous gênent pas, après tout nous sommes dans le domaine du fictif où les règles de la vraisemblance et de la bienséance sont là pour être bousculées. En revanche, les contradictions (Strobile est le nom de l’esclave d’Euclion au début, mais ensuite c’est aussi le nom de l’esclave de Lyconide) nous amènent à accepter la théorie que « La comédie de la Marmite » soit inspirée de deux pièces grecques et non pas d’une. Il est vrai qu’il y a vraiment deux parties, la description de la situation, centrée autour d’Euclion, son avarice, son secret, et la suite des circonstances qui amèneront à l’union de Lyconide et de Phédrie. Une histoire d’avare et une histoire d’amour que Plaute a très habilement su imbriquer et fusionner. Il est très difficile de déterminer la nature des pièces en question, mais il pourrait s’agir d’une pièce de Ménandre et d’une pièce de Diphile.
Ensuite, « La comédie de la Marmite » prendra une autre forme au Dix Septième siècle avec « L’avare » de Molière.
Le monologue et le quiproquo, des morceaux de bravoure comiques
Le monologue, rien que pour le plaisir…
« Je suis fini, je suis mort, je suis assassiné. Où courir, où ne pas courir ? Arrêtez-le ! arrêtez-le ! Qui ? Et par qui ? Je ne sais, je ne vois rien, je suis aveugle ; où vais-je, où suis-je, qui suis-je, je ne suis plus certain de rien…. »
Et le quiproquo…
« L- J’avoue que j’ai eu tort et je sais que j’ai commis une faute ; c’est pour cela que je viens maintenant te prier, te demander de me pardonner, sans te fâcher.
E- Pourquoi as-tu eu l’audace de toucher à ce qui ne t’appartenait pas ?
L- Que veux-tu ? C’est fait, maintenant ; on ne peut le défaire. Je suis sûr que les dieux l’ont voulu ; je sais bien que, s’ils ne l’avaient pas voulu, cela ne serait pas arrivé…. »
Du haut de ces vers, vingt-trois siècles nous contemplent…
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