Il se pencha et s’aspergea le visage d’eau fraîche. En se redressant, il croisa soudain son regard et sursauta. Pourtant, le corps endurci, moulé dans la combinaison de cuir était bien le sien. De nouvelles rides étaient apparues autour de ses yeux dont le bleu, à présent, se faisait glacial.
Il se saisit du tsuba et fit sortir la lame du katana de quelques centimètres, songeur. Puis, il reposa le sabre sur le lit et pris le casque intégral. Lentement, il le mit sur sa tête et se tourna vers le miroir. Tout était parfait : la visière argentée garantirait son anonymat, même en cas de vidéosurveillance, même en cas de témoin.
Il sortit et pressa le démarreur. Les phares s’allumèrent au son rauque du ralenti. Il vérifia son chargement, puis mit le sabre en bandoulière. Enfourchant la moto, il leva la tête un instant, à l’affût d’un signe, d’une odeur, d’un flash ou d’une image. Juste un signe...
... mais rien de particulier ne vint lui annoncer que l’heure était venue. Cette nuit serait pareille aux autres : belle, sourde, aveugle, indifférente. Il mit les gants et abaissa la visière. Tout commençait, tout recommençait. Comment échapper au cycle infernal ? Comment penser à autre chose sans, pour autant, oublier ? Comment s’étourdir sans se droguer ? Comment échapper à ce monde sans le quitter ?
Sa seule réponse était la vitesse : fuir vers l’avant pour ne pas reculer. Passer, juste un peu plus vite que les autres.
Il tourna la poignée des gaz. Tout recommençait.