par Honoré de Balzac
Prix : 0,99 €
ISBN : 978-1-909782-61-7
Nombre de pages : 351 pages
Langue du livre : français
Thème : Romans
« La peau de chagrin » est un roman fantastique de Honoré de Balzac publié en 1831. Il s'agit du premier grand succès de librairie de Balzac. Si ce roman annonce déjà les grands thèmes de La Comédie humaine, il est d'une grande originalité par sa teneur fantastique, qui reste le thème central du roman : la peau de chagrin qui se racornit à chaque désir exaucé, belle idée aux parfums orientalistes et nouvelle incarnation du pacte faustien.
L'action commence en Octobre 1829 au Palais-Royal. Un jeune homme entre dans une maison de jeu et perd. Ruiné, suicidaire, il erre dans Paris et entre chez un antiquaire où il découvre une véritable grotte aux trésors avant d'être interrompu par l'apparition presque « magique » d'un vieil homme : « Un peintre aurait, avec deux expressions différentes et en deux coups de pinceau, fait de cette figure une belle image du Père éternel ou le masque ricaneur du Méphistophélès... ». Le vieil homme prend d'abord le jeune aristocrate dépressif, Raphaël de Valentin, pour un voleur, mais ce dernier le détrompe. Le vieil homme sort alors une peau de chagrin d'un aspect surprenant : « Les grains noirs du chagrin étaient si soigneusement polis et si bien brunis, les rayures capricieuses en étaient si propres, et si nettes, que, pareilles à des facettes de grenat, les aspérités de ce cuir oriental formaient autant de petits foyers qui réfléchissaient vivement la lumière. ». Il lui montre alors des caractères incrustés dans la peau qui expliquent (en sanscrit) le principe de la peau de chagrin : «A chaque vouloir, je décroîtrai comme tes jours. ».
Raphaël prend la peau. Sa vie va être transformée. Il devient très riche, jouit de tous les plaisirs sans modération. Pauline, sa jeune voisine, devient folle amoureuse de lui. Il a même pour projet d'écrire un livre, La théorie de la volonté. Mais la peau continue à rétrécir, et il tombe malade. En dépit de son jeune âge, son état de santé est celui d'un vieillard. Pour essayer d'arracher à la vie encore quelques instants, il vit seul, reclus, à la campagne. Il finit par mourir, avec un immense sentiment de regret et d'inachevé : « Raphaël tira de dessous son chevet le lambeau de la peau de chagrin, fragile et petit comme la feuille d'une pervenche, et le lui montrant : - Pauline, belle image de ma belle vie, disons-nous adieu ! Dit-il. – Adieu ? Répéta-t-elle d'un air surpris. – Oui. Ceci est un talisman qui accomplit mes désirs, et représente ma vie. Vois ce qu'il m'en reste Si tu me regardes encore, je vais mourir... »
Une peau de chagrin est un cuir d'onagre, de chèvre ou de mouton, qui servait jusqu'au Dix Neuvième siècle à la couverture et la reliure des livres.
La comparaison avec le roman d'Oscar Wilde vient tout de suite à l'esprit : un pacte faustien, un jeune homme, la déliquescence physique comme prix à payer pour les honneurs, la gloire, la fortune et l'amour...Mais on sait que Oscar Wilde lisait Balzac.
Si le sujet central du roman (et son titre) est fantastique («apparition du surnaturel au sein du familier »), « La peau de chagrin » ne peut être considéré comme un roman ou un conte fantastique « classique ». Les éléments réalistes forment la grande majorité des thèmes du livre. L'explication tient probablement à la genèse de « La peau de chagrin ». L'idée serait en effet apparue fin 1830. C'est l'élément « conte oriental », qui constitue l'élément fantastique et la principale originalité du roman. Mais des fragments furent publiés la même année dans la Revue des Deux mondes. Il est possible d'émettre l'hypothèse que Balzac ait écrit puis voulu réunir des éléments disparates, unis par la trame centrée autour de la rencontre du début entre Raphaël et l'antiquaire, et la peau de chagrin. Si la structure du roman peut sembler parfois un peu « rapiécée », la richesse du texte et l'idée de départ font de « La peau de chagrin » un des plus grands romans balzaciens.
Un aspect généralement moins commenté de « La peau de chagrin », c'est la critique sociale à laquelle se livre l'auteur. A l'époque, la jeunesse romantique (dont Balzac fait partie), désabusée, découvre que l'histoire, c'est finalement toujours prendre les mêmes et recommencer. Quelques mois après la Révolution de Juillet, voici comment Balzac voit la société : « L'infâme Monarchie renversée par l'héroïsme populaire était une femme de mauvaise vie avec laquelle on pouvait rire et banqueter ; mais la patrie est une épouse acariâtre et vertueuse ; il nous faut accepter, bon gé, mal gré, ses caresses compassées.... ». Ou encore : « Entre les tristes plaisanteries dites par ces enfants de la Révolution à la naissance d'un journal, et les propos tenus par de joyeux buveurs à la naissance de Gargantua, se trouvait tout l'abîme qui sépare le XIXème siècle du XVIème. »(Balzac était un grand admirateur de Rabelais). Nul doute que la déception de Raphaël qu'il exprime avec emphase en évoquant son chef d'œuvre en gestation, La théorie de la volonté, ait des accents autobiographiques, et rappelle qu'à la base de La Comédie humaine, probablement la critique de la société la plus achevée que l'on connaisse, on ait un jeune homme d'à peine trente ans dégoûté de ses semblables. En cela, il est possible que « La peau de chagrin » préfigure Louis Lambert. Louis Lambert, Raphaël, et le jeune Honoré sont fort semblables: par delà les circonstances historiques qui contribuent à leur spleen (et en cela ces romans font clairement partie de l'histoire du Romantisme), spleen qui trouve une échappatoire dans l'imaginaire et le fantastique, les trois jeunes gens ont ceci de commun que la soif d'absolu, leur envie de savoir et de créer, sont à la mesure de l'incompréhension hostile que la société affiche à leur égard. Balzac ne renoncera à ses prétentions au génie que par l'élaboration d'une des œuvres les plus étourdissantes de la littérature. Ce qu'il ne pourra obtenir dans la fulgurance, il le fera dans le travail.
© 2013- Les Editions de Londres