par Comte Kerkadek
Prix : 4,99 €
ISBN : 978-1-910628-62-1
Nombre de pages : 302 pages
Langue du livre : français
Thème : Nouveautés!
« Mississippi blues » est un roman du Comte Kerkadek publié en 2016 par Les Éditions de Londres.
Rien ne va plus pour Kerkadek. Son traitement, à base de whisky breton et d'héroïne pure, est si puissant qu'il voit la jungle pousser dans sa chambre et des serpents multicolores s'enrouler autour des pales de son ventilateur. Mais une nuit de tempête, il reçoit la visite d'un Archange, qui lui apprend qu'il a été choisi pour une mission : retrouver le célèbre Bluesman Robert Johnson dans le delta du Mississippi avant qu'il ne vende son âme. C'est l'avenirde l'humanité qui est en jeu, lui explique l'Archange. Pour mener à bien sa mission, Kerkadek devra voyager dans le temps.
Dans cette aventure comico-fantastico-musicale, le Comte Kerkadek parcourra les Etats-Unis des années 80 jusqu'aux années 30, il fréquentera les guitar heroes et les stars du rock, il rencontrera les Blues Brothers, des trafiquants de drogue, des bandits chinois, des contrebandiers de la Prohibition, des hippies fumeurs de chanvre et beaucoup de Bluesmen. Il échappera à la police de plusieurs États, aux triades, au Ku Klux Klan et affrontera le plus grand ennemi qu'un auteur de roman puisse imaginer.
« Mississippi blues » est un roman inclassable. Fantastique, antéchronologique, musical, c'est le cinquième roman du Comte, et son hommage au Blues.
Le Blues, c'est la plus belle des musiques. C'est l'émotion pure, c'est l'inspiration de tous les grands guitaristes et des musiciens modernes. C'est une musique née aux confins de l'histoire, c'est la conséquence de deux siècles d'esclavage, le cri de l'homme noir qui peut enfin exprimer ce qui existe et palpite au plus profond de son être. C'est aussi une musique née d'un fleuve, le Mississippi. De même que certaines musiques sont nées des Caraïbes, ou de la baie de Rio, ou du Sertao, le Jazz est né d'une ville, le Blues est né du grand fleuve qui unit le sud profond de l'Amérique à sa troisième métropole, Chicago.
Le Blues est bien plus qu'une musique. Comme le dit le Comte lui-même, c'est la Bible qui chante. Le Blues et son histoire, ses mythes, ses villes, ses personnages, c'est sans aucun doute l'Ancien Testament (Memphis, Nil-Mississippi, fermiers blancs-Égyptiens, noirs-Juifs, exode-transhumance, fin de l'esclavage, Chicago-Israël...). Des paysages cotonniers du sud des Etats-Unis dans les années dix, puis vingt, puis trente, naquit la Blues. Du Blues naquit le be-bop, le boogie-woogie, le rock n'roll, le rock, la contre-culture et toute la civilisation moderne. Au commencement était le Blues... Il est donc bien naturel que le Comte y ait consacré un an de sa vie.
Afin de réunir tous les éléments qui serviront à la genèse de cette histoire : les noms, les faits, les lieux, les interviews, les musiques, les partitions, les guitares, le Comte a sillonné le sud profond pendant des semaines et des mois, puis il est parti naviguer sur le Mississippi, du nord au sud, du sud au nord, freinant un peu dans les méandres, vu qu'ils sont nombreux, et se battant avec courage contre le temps immobile. Il s'est rendu un peu partout, en Louisiane, dans le Mississippi, en Arkansas, lieux mythiques pour tout encyclopédiste du Blues et dont il reproduit avec fidélité et panache l'ambiance et l'atmosphère. Il a même résidé un certain temps à Clarksdale, et il s'est rendu lui-même la nuit au croisement des routes 49 et 61. Chapeau bas, Comte !
« Mississippi blues » est bien davantage qu'un grand roman. Pour tout amateur qui souhaiterait un jour passer sa licence de Blues, c'est une source d'informations uniques sur le Blues, mais surtout sur le Delta Blues. On y apprend tout ou presque sur Robert Johnson, mais aussi Charley Patton, Son House, Willie Brown, et Ike Zinnemann, Muddy Waters, B.B. King, Howlin' Wolf, Elmore James, Kokomo Arnold, Bessie Smith, Memphis Minnie, Tommy Johnson, Lonny Johnson, Louise Johnson, Memphis Slim, Sonny Boy Williamson, T-Bone Walker, Big Bill Broonzy, Blind Blake, Mahalia Jackson...et beaucoup beaucoup d'autres...
Historiquement, l'Archange Gabriel est souvent cantonné à des petits rôles. Si ce n'étaient pour ses longs cheveux blonds et ses yeux en amande, on aurait tout aussi bien pu l'oublier. Sa carrière semblait finie. Un peu comme Tarentino avec Travolta, Samuel Jackson, Pam Grier, David Carradine...le Comte lui donna une nouvelle chance. Dans « Mississippi blues », l'Archange Gabriel se voit en sauveur de l'humanité, menacée par un second déluge. Son idée d'aller retrouver Robert Johnson, de le convaincre de sauver son âme, et pour cela d'utiliser un humain suffisamment intelligent pour affronter Satan, suffisamment naïf pour...affronter Satan, cette idée, elle est géniale. De plus, Gabriel commençait à s'ennuyer ferme là-haut où, comme nous le rappelle le Comte, c'est beau mais on n'y joue pas de Blues.
Le voyage dans le temps est un phénomène littéraire assez récent. Enfant lecteur d'H.G.Wells (dont il cachait les ouvrages sous les fûts de chouchen pour que sa grand-mère Kerkadek ne les découvre pas), le Comte en connaît un bout sur les voyages dans le temps. Et il considérait que le voyage dans le temps n'avait pas été suffisamment exploré. Trop anecdotique, trop dystopique, le voyage dans le temps comme moyen de changer la destinée humaine plutôt que de se résigner était une tactique littéraire peu courue jusqu'au brillant roman de Stephen King avec 22/11/63 paru il y a quelques temps. Dépourvu de la technologie permettant de se promener dans le temps comme au parc le dimanche après-midi, le Comte procède à plusieurs innovations : la boîte de Blues comme machine métaphysique à remonter le temps, les couleurs qui changent en fonction de l'époque et de leur influence cinématographique, le mal de crâne qui augmente en fonction de la distance séparant le voyage de l'origine, les repères musicaux qui sont autant de balises aidant le malheureux voyageur dans le temps à se convaincre qu'il n'est pas complètement fou, sans compter tous les paradoxes spatiotemporels auxquels le Comte sera confronté, lorsqu'il se retrouve dans l'Indiana en 1982, puis en Californie en 1965 et 1967, enfin dans le Mississippi en 1930.
Le Diable, la famille Kerkadek connaît bien. Jusqu'à la Renaissance, le Diable était d'ailleurs l'explication favorite des anciens Kerkadek pour donner un sens à l'inexcusable, à l'inavouable. D'inspirateur de terreur, à prince déchu terni par une mauvaise réputation, le Diable fut ensuite confiné dans l'Occident à un oubli coupable. Avec « Mississippi blues », Kerkadek contribue au regain d'intérêt pour le Diable et ses actes. Mais le Diable que nous offre le Comte n'a rien à voir avec les représentations terrifiantes du Moyen-Âge, ni avec celles, romantiques, du Dix-Neuvième siècle. Le Diable que nous dépeint Kerkadek est surtout très humain. S'il fait le Mal, parfois il regrette. C'est sa nature comme il le dit lui-même. Au moins, à la différence des coniques du Ku Klux Klan, des gens biens comme il faut qui sont toujours prêts à se jeter dans les bras des tyrans, des exterminateurs ou des batteleurs de foire, le Diable de Kerkadek est un être aux multiples facettes, humain, torturé, un être bien plus proche de nous que notre Créateur. Mais pourtant, ne nous leurrons pas : lui ne nous veut pas de bien. Kerkadek l'affrontera dans la scène finale pour le plus grand bonheur des grands et des plus petits qui composent le lectorat éclectique du Comte.
C'est bien la question posée par Jimi Hendrix et Robert Johnson à la fin du roman. Certains lecteurs nous firent observer que la réponse du Comte était un peu primesautière. Nous nous sommes donc renseignés (parce que le lecteur est roi), et selon nos dernières informations, le Déluge n'est pas prévu avant bien longtemps. Donc, dormez tranquilles, braves gens.
© 2016- Les Editions de Londres