par Comte Kerkadek
Prix : 4,99 €
ISBN : 978-1-909782-62-4
Nombre de pages : 181 pages
Langue du livre : français
Thème : Nouveautés!
« L'homme qui n'aimait pas Paris » est un roman du Comte Kerkadek publié en 2014 par Les Editions de Londres. Certains considèrent que c'est un récit, dénoncent ceux qui prétendent que c'est un roman, mais ceux-là ne sont généralement pas réinvités aux soirées entre amis où l'on a parlé de « L'homme qui n'aimait pas Paris » pendant toute la soirée. Ceux qui disent que c'est un roman ne croient pas que le Comte Kerkadek ait réellement vécu cette aventure. Ils en dénoncent les côtés franchement invraisemblables comme la présence de cigares de Manille et d'allumettes suite à des séjours prolongés dans l'eau. « L'homme qui n'aimait pas Paris » est donc la source de disputes qui n'en finissent pas dans les soirées entre amis, sur les plateaux de télévision, et surtout dans les réunions de famille. « L'homme qui n'aimait pas Paris », c'est la pomme de discorde qui va agiter le tout-Paris. « L'homme qui n'aimait pas Paris », ce n'est pas le troisième roman du Comte Kerkadek, c'est de la dynamite.
En revanche, ça on peut vous le dire. C'est une histoire assez incroyable, ce qui explique peut être que ses critiques nient que le Comte nous ait pondu ici un récit journalistique à la manière d'Albert Londres. Tout commence à Hong Kong, à la suite d'une nuit endiablée passée à jouer aux dominos ou Mah Jong en buvant du Mo Tai à la paille, ce que d'ailleurs l'éditeur déconseille fortement à ses lecteurs mineurs ou à ceux pesant moins de trente kilos. Le lendemain de cette soirée donc, l'auteur se promène sur le marché de Wan Chai et tombe sur un gwailo qui chaparde tous les journaux du matin. Surpris par son apparence quelque peu exotique (en fait il ressemble à un Parisien les jours de bureau, ce qui met la puce à l'oreille au Comte, vu qu'il n'y autour de lui que des Chinois en sandales), il se précipite, manque le rattraper, mais l'autre est plus rapide sur son triporteur. Ce qu'il y avait en première page, ou deuxième, on ne sait plus, du canard en question, on ne peut pas vous le dire, vous le découvrirez bien assez vite. Le Comte est dépité, et pense toujours à cette aventure tout en fumant ses cigares de Manille en regardant les pales du ventilateur dans la chambrée de son hôtel louche de Wan Chai, où il est seul, à part les deux jeunes femmes qui lui prodiguent un sacré massage des gros orteils. Le lendemain, car il y beaucoup de lendemains dans cette histoire, mais pas forcément des lendemains qui chantent, le Comte appareille, quitte le port de Hong Kong, navigue tranquillement, quand quelques jours plus tard, alors qu'il ne demandait rien à personne, il est surpris par une tempête d'une violence inouïe, un truc qui lui rappelle la fois (précédemment évoquée) où il trouve deux kangourous morts sur son pont. Enfin bref, il n'a pas le temps de fouiller dans ses souvenirs, il cherche à s'en sortir, il cargue les voiles, se bat comme un beau diable, mais finalement cède, moins fort que les éléments déchaînés. Il se réveille le lendemain non pas chez Saint Pierre, mais sur le sable blanc d'une île déserte, perdu dans le Pacifique Sud.
Non mais franchement, qu'auriez-vous fait à sa place ? Il se lance dans la jungle murmurante des soupirs d'oiseaux exotiques, grouillantes de reptiles, tous plus effrayants les uns que les autres, et il débarque dans une clairière, où il découvre...
Pour ceux qui se souviennent de ces après-midi langoureux à regarder Mission Impossible, avec Jim Phelps, qui entre dans l'arrière-boutique d'un vendeur de scoubidous pour trouver un dossier avec des photos, et le magnétone qui fume, il n'y a pas de doute, « L'homme qui n'aimait pas Paris » est un tel paquet de dynamite, que votre liseuse risque de ne servir qu'une fois, ce qui au passage sert les intérêts de l'éditeur, Les Editions de Londres, lequel ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche, bien que...Une fois que la liseuse explose au chapitre quatre, le lecteur envoûté n'a d'autre choix que de courir chez son marchand préféré, en racheter une autre, mais surtout, il rachète un exemplaire de « L'homme qui n'aimait pas Paris », normal, puisqu'il veut connaître la fin de ce suspense insoutenable, car c'est bien ça, cette bombe que nous a préparé le Comte Kerkadek, c'est de la nitroglycérine.
Le Comte découvre une prison de haute sécurité où l'on enferme tous les délinquants d'opinion. Qui a fait ça ? L'Etat français. Alors, c'est la faute à Hollande, celle à Sarkozy, ou alors, bon Dieu mais c'est bien sûr, c'est Ségolène Royal ! Elle cherche à être présidente, se prend une taule avec Sarko, alors elle se dit qu'elle va enfoncer la Merkel française, Martine Aubry, mais on lui pique ses voix. Alors, elle danse Dirty dancing avec Strauss-Kahn, mais manque de bol, il est à New York, en train de gourmander la domesticité. Elle se rabiboche avec Hollande, il est trop tard, il est avec Trierweiler. Elle cherche à rebondir à La Rochelle, Trierweiler lui plante un poignard dans le dos comme Clytemnestre. Un peu comme Terminator, elle se recompose, cherche à descendre Trierweiler, mais le Président Hollande est déjà passé à une autre...Bref, on pourrait croire qu'elle serait derrière tout ça. Ce serait la logique même. Eh bien pas du tout ! Non, l'auteur nous laisse un peu dans le flou sur ce plan là. Mais le fait est qu'elle existe, cette prison, on y compte une centaine de détenus...
Il faut bien dire qu'on se paie un peu la trombine du monde libre depuis quelques années. On a franchement droit à tout : une guerre d'Irak montée de toutes pièces, la farce de Guantanamo, les documents secrets des Ambassades américaines dévoilées par Wikileaks, Snowden, les écoutes de la NSA (à ce propos, plus de problème de répondeur téléphonique, plus besoin de backer et rebacker vos fragiles clés USB, il vous suffit d'appeler Brad à la NSA et il a les derniers enregistrements de vos conversations privées, vos emails, vos déclarations d'impôts, vos mots de passe de comptes bancaires, et tout...). La posture politique de « L'homme qui n'aimait pas Paris » est donc sans nuance, subversive, anti-Etat, suspicieuse de toute organisation dépassant la taille d'un village du Finistère, et encore sans les cochons. En dénonçant Paris et ses travers, l'auteur a trouvé une façon (originale ? Enfin oui, pour un auteur Breton peut être) de s'en prendre à l'arrogance, à la morgue de tous ces morts vivants qui ont pris les commandes de nos sociétés post apocalyptiques et nous mènent gentiment droit au mur. « L'homme qui n'aimait pas Paris » n'est donc pas une satire, pas un pamphlet, pas une diatribe, pas un dialogue philosophique, pas un essai, c'est bel et bien un ouvrage politique dont la portée risque de plonger Les Editions de Londres encore plus dans l'ombre qu'elles ne le sont déjà. Quant à la saisie du livre, là manque de bol, à part si la NSA s'en mêle, ça va être peu dur de trouver nos serveurs, ils sont cachés dans les bocages du terroir breton.
Bon arrêtez un peu les questions. Il s'agit d'une préface à un livre qui va effrayer le haut fonctionnaire, qui va défrayer la chronique, ce n'est pas un essai sur le roman, on laisse ça aux journalistes qui refuseront de lire le livre à sa sortie mais en écriront des tartines dès qu'on se le passera sous le manteau ou dès qu'il envahira les conversations des dîners en ville. On pourrait vous dire que New York, c'est sacrément beau, que ça grouille, que ça sent la constante ébullition, que Londres c'est plein d'histoire, qu'on s'y perd, que tout y change, aussi horizontalement que les choses changent verticalement à New York, comme d'ailleurs Céline le reconnaissait il y a longtemps : « Figurez-vous qu'elle était debout leur ville, absolument droite. New York c'est une ville debout... ». Et Sao Paulo ? Tokyo ? Shanghaï ? Kuala Lumpur ? Tout ça, des villes, belles ou non, mais des villes qui explosent de façon continue, des feux d'artifice architecturaux, rien de cette architecture de sarcophage que nous avons hérité de Haussmann. Paris, c'est différent, ce n'est pas la nature en action, c'est le tombeau de Toutankhamon. Mais je ne vous en dis pas plus, je pense que vous vous ferez facilement une idée dès les premières pages...« Est-ce la pierre de taille qui nous entraîne vers le sol comme une ancre de pétrolier accrochée à nos consciences? Cette haine farouche de la pétulance, ce conformisme en toutes choses, ces monuments, tous statiques et ennuyeux comme des volcans éteints, cette absence d'imagination qui est la marque de fabrique du fonds architectural parisien, ces balcons si austères que l'on voudrait sauter, ces coins de rue dont on a éviscéré toute fantaisie ? Et ces avenues diagonales qui tranchent dans le fonds médiéval parisien comme la scie égoïne du tueur en série ? Le Paris haussmannien, c'est la castration des esprits, le jappement obligatoire, la civilisation bourgeoise dans toute son horreur, son opulence dégradée et mesquine, c'est toute la lourdeur de chemin de fer du Dix Neuvième siècle, l'art occidental dans ce qu'il fit de pire, contrôlé, domestiqué, prévisible, pudibond comme un confessionnal à ciel ouvert, c'est l'arrogance de l'homme blanc sûr de son fait, fier jusqu'à la nausée de ses expositions coloniales, c'est l'héritage dont je dois avant tout nous débarrasser. Que ceux qui songent encore à défendre cette architecture d'arpenteur, cette esthétique de bureaucrate, me jettent la pierre. Moi, la sentence, il y a bien longtemps que je l'ai prononcée ! »
On pense évidemment à Haussmann auquel sont consacrés quelques chapitres croustillants. On ne va pas revenir dessus. On pense aussi au héros de cette histoire, le petit rouquin aux yeux pétillants de bonté...Puisque c'est bien lui qui cherche à faire sauter Paris, ou au moins une petite partie, histoire de procurer aux autres l'inspiration nécessaire pour lui emboîter le pas, et continuer son œuvre. En cela, « L'homme qui n'aimait pas Paris », ce serait en quelque sorte l'open-source de la destruction. On pense aussi au Comte Kerkadek, dont certains disent qu'il a inventé cette histoire de toutes pièces, ce qu'il nie catégoriquement, même sous la torture. Parce que le Comte, comme tout provincial éduqué dans le respect de la supériorité indiscutable de Paris, Paris, ça l'impressionne toujours, et il a eu du mal à adhérer au projet de son ami le rouquin. Serait-ce alors le créateur des Editions de Londres ? Mais évidemment que non, ce dernier, élevé lui aussi dans le culte parisien, bien qu'un peu à la périphérie, ce qui lui permit peut être de voir mieux que les autres, et plus tôt, ce dernier professa toujours une admiration forcée pour la ville aux cent villages, lieu et théâtre de tant d'évènements marquants. Alors, c'est le mystère ? En revanche, celui qui aime Paris, c'est probablement le lecteur, qui sera convaincu du bien-fondé du projet du rouquin à la suite de la lecture de cet ouvrage révolutionnaire.
Bien avant que le Comte Kerkadek ne publie Pacifico et Atlantido, il avait envoyé une mouture inachevée, sorte de graine qui servira un jour à l'écriture de « L'homme qui n'aimait pas Paris ». Cette graine, avant que n'arrive l'édition numérique, il l'envoya gentiment aux éditeurs parisiens. Comme il fut reçu ! Un jour nous publierons les réponses de ces éditeurs, toutes aussi surprenantes les unes que les autres, certains dont nous taierons les noms, des éditeurs avec pignon sur rue, accusèrent carrément le Comte de crime de lèse-majesté, de trahison, de « propos diffamatoires sur notre belle capitale », et j'en passe... Allez, à mourir de rire.
La littérature numérique, ce n'est pas publier des classiques libres de droit au même rythme que des croissants le matin dans un Carrefour de quinze mille mètres carrés, ce n'est pas non plus publier des livres que personne ne veut lire à tire-larigot, c'est aussi faire un vrai travail d'éditeur, mais c'est également vendre, du policier, de la science-fiction etc. et aussi les trucs un peu bêtes qui se vendent bien, parce que c'est plus pratique de les acheter comme ça, sans se faire trop remarquer, à savoir l'érotique et la romance. Et franchement, même si nous n'en faisons pas, nous n'avons rien, absolument rien, contre les gens qui en font, nous leur souhaitons bonne chance, nous souhaitons qu'ils réussissent, car il faut lire, et il faut que les gens achètent, et tout le monde, éditeurs, auteurs, lecteurs, tout le monde en profitera. Pourtant, la littérature numérique n'est pas encore mûre. Il lui manque pas mal de choses. Obsédée, effrayée par son avenir commercial, elle en oublie souvent qu'elle a un rôle subversif, et c'est pour cela que nous sommes fiers de lancer enfin un ouvrage vraiment polémique. Il faut plus de littérature grincement de dents, de littérature poil à gratter, quelque chose qui fasse enfin avancer le débat, des livres dont on parle, dont on ait envie de parler, qu'ils soient bons ou mauvais, mais pas seulement à cause, ou en dépit de leurs qualités littéraires. Après la microchirurgie, il était temps de passer à l'artillerie lourde. Voilà maintenant qui est fait. Alors, merci Comte !
© 2014- Les Editions de Londres
Avis de : Laura - 19 mars 2014
Une très belle satire, je me suis régalée !
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